(POUR L’ABRÉGÉ DES RÈGLES, C’EST PAR ICI. POUR LA FOIRE AUX QUESTIONS, C’EST PAR LÀ)

N.B. La présente rubrique vient compléter ou expliciter les règles de Tunnels & Trolls, que vous pouvez vous procurer chez Lulu.

Sorcerer's Apprentice n° 11Contrairement à certains autres jeux de rôle, le livre des règles de Tunnels & Trolls ne met pas à la disposition des joueurs tout un catalogue de classes, mais juste quelques archétypes. La version 8, même si elle introduit les spécialistes, reste dans cette logique. En effet, comme l’a voulu l’auteur, Ken St. Andre, les règles de T & T doivent encourager la créativité, et non fournir des listes et formules se voulant exhaustives et canoniques.

Du coup, il y a toujours eu de très nombreuses initiatives pour introduire de nouveaux types de personnages pour T & T. Ken St. Andre a montré l’exemple lui-même très tôt en écrivant un article sur la manière d’adapter les personnages d’Arduin à Tunnels & Trolls (voir Sorcerer’s Apprentice n° 11).

Avec la création des spécialistes dans T & T 8, Ken St. Andre a voulu donner aux joueurs une piste de réflexion pour mettre au point leurs propres types de personnages. En réalité, les forestiers, les mages spécialistes et les meneurs ne sont que des exemples de ce qui peut être fait, comme l’a confirmé l’auteur dans sa récente interview.

« Les spécialistes sont en effet un moyen pour les joueurs de créer de nombreux autres types de personnages sans qu’il soit nécessaire de décrire en détail des centaines de types de personnages différents dans les règles du jeu. Au départ, j’ai choisi le tireur d’élite, le guérisseur et le meneur comme spécialistes tout simplement parce qu’ils sont la première chose qui me soit venue à l’esprit lorsque j’ai voulu voir ce que pouvait donner un personnage à la dextérité, au fluide ou au charisme particulièrement élevé. »

Aaron w. Thorne a été (à notre connaissance) le premier à suivre cette piste en inventant sa propre version du voleur, du barbare, du technicien, de l’assassin et du moine-guerrier pour T & T, s’inspirant d’ailleurs de l’article susmentionné de Ken St. Andre, paru en 1981. Par exemple, il est possible de créer un barbare en amenant au moins 15 en force au moyen d’un brelan. La FOR des barbares d’Aaron compte double dans le calcul de leur bonus de combat. En revanche, ils ne peuvent porter d’armure offrant plus de 7 PP et ne se servent pas de boucliers.

Ne vous fiez pas à sa gueule d'ange !

(c) Luis Royo, extrait de Dead Moon

Paul Sanders a voulu créer des spécialistes en arts martiaux. Ses spécialistes ne se servent d’aucune protection autre que leur corps, mais leurs facultés exceptionnelles d’esquive leur offrent 1 point de protection pour chaque point de DEX supérieur à 12. S’ils combattent à mains nues, ils jettent autant de dés que leur niveau, et leur DEX compte double pour calculer leur bonus de combat. Sinon, leur bonus de combat est normal lorsqu’ils combattent au moyen d’un katana ou d’un nunchaku, par exemple. Paul leur a également donné certains talents, le premier (obligatoire au N1) étant un talent de combat à mains nues, leur permettant de désarmer un adversaire en faisant une MEP égal au niveau de ce dernier.

En ce qui concerne les armes orientales, il faut savoir que quelques articles complets leur ont été consacrés dans Sorcerer’s Apprentice, le magazine pour Tunnels & Trolls qu’éditait Flying Buffalo dans les années 1980. Si cela vous intéresse d’en savoir plus, la fonction « commentaires » (ci-dessous) est là pour ça 🙂

Paul a également créé ses propres variantes de guerriers pour les besoins de sa campagne, avec des barbares, des paladins et sa version des forestiers. Son idée est simple : donner à chacun des avantages et des restrictions en termes d’armement. Ils bénéficient d’un bonus pour leur arme de prédilection et l’un de leurs attributs compte double pour le calcul de leur bonus de combat. Par exemple, la force des paladins compte double lorsqu’ils manient des armes de mêlée. Paul a également donné des bonus pour certains attributs lors de la création du personnage, en fonction de son type.

Michael Eidson a été à la fois plus original et plus terre-à-terre en élaborant un nouveau mage spécialiste : le sorcier solitaire, qui bénéficie de nombreux avantages pour jouer en solo !

(c) 2009, Hendry Roesly

(c) 2009, Hendry Roesly

Un peu comme Paul Sanders, Brian Penn applique des coefficients d’attributs en fonction des types de personnages, exactement comme ce qui se fait pour les espèces (races). Son autre idée est de créer des spécialistes basés sur une série de talents spécifiques. C’est ainsi qu’il a mis au point son alchimiste et son bibliomancien. Mieux encore, Brian a inventé des spécialistes animistes, qui sont un mélange très original de garous et de mages spécialistes.

Malgré tout l’intérêt de ces approches, il est tout à fait possible, avec T & T 8, de recourir aux moyens déjà présents dans les règles pour affiner ses personnages.

Comme nous allons le montrer, on peut en effet tout à fait se passer de nouvelles règles, de nouveau tableaux et de nouvelles listes pour peaufiner ses personnages. Tunnels & Trolls 8 offre quatre moyens privilégiés de le faire : par les attributs et autres caractéristiques, par les armes et l’équipement, par la « couleur locale » et enfin (c’est là le facteur décisif) au moyen des talents. Nous vous montrerons également quelques exemples de personnages qui pourront vous inspirer ou vous servir de PNJ.

Nous avons déjà parlé de la possibilité (classique) de créer de nouveaux types de personnages. Beaucoup l’ont fait pour les besoins de leur campagne. Citons en premier lieu G. Vacca, qui a créé un certain nombre d’archétypes simples et efficaces pour sa campagne Glorantha jouée avec les règles de T&T. Citons ensuite les 25 archétypes créés pour Tunnels & Trolls par Tori Bergquist pour sa campagne Keepers of Lingusia / Ancient Realms dans The Troll’s Companion, qui ont chacun des avantages et des handicaps.

Voyons maintenant la première des quatre clés qui vous permettront de mieux camper vos personnages dans T&T 8.

Attributs et autres caractéristiques

de Morsac

Un exemple de personnage créé au moyen de la « Hero Machine »

Lorsque vous créez un personnage, vous pouvez utiliser la méthode dite « avancée ». Dans la mesure où celle-ci vous permet de répartir librement les points entre les différents attributs, vous pouvez choisir de créer un freluquet rusé, une belle écervelée, un crétin ayant deux mains gauches, mais une force colossale, etc. La combinaison des 8 attributs devrait déjà donner une première idée de votre personnage.

Inutile de déterminer son poids et sa taille de manière aléatoire. Comme le précisent les règles elles-mêmes : « Vous pouvez donner à votre personnage la taille et le poids de votre choix ». Il en va de même pour son âge, son sexe et son espèce.

Une fois qu’il aura acquis un peu d’expérience, votre personnage pourra augmenter un ou plusieurs de ses attributs. À vous de voir lesquels, et de combien de points (en fonction, bien sûr, des points d’expérience accumulés par votre personnage). Cela vous permettra de peaufiner déjà un peu votre personnage et de le faire évoluer.

Bien des choses peuvent arriver à votre aventurier au cours de sa carrière: des cicatrices – ou des tatouages mal placés – peuvent apparaître sur son corps, il peut avoir une main en diamant, acquérir la faculté de voir dans l’obscurité, avoir une nouvelle couleur de peau ou s’être fait pousser une queue de rat ou de scorpion par enchantement, etc.

Il peut avoir choisi d’adorer Jambavan le dieu des ours, s’établir dans la cité méridionale de Khamad, acheter des esclaves et des chameaux et faire le commerce de la soie et des épices avec le bourg de Knouki, avoir un harem et installer un camp permanent camp près d’une oasis dans le Désert de Bronze. Ou bien, il pourrait acheter son premier bateau et faire voile vers La Mouette dans l’optique de faire concurrence à la Compagnie de Knor/Phoron Est et de devenir un corsaire.

À mesure que la biographie de votre personnage s’enrichira, son individualité s’affirmera de plus en plus.

D’ailleurs, certaines aventures peuvent le spécialiser dans son type. Ainsi, le solo de Sid Orpin intitulé Devotion to Duty peut en faire un novice travaillant dans l’Hospice de la Fraternité de la Protection de la Grande Déesse Hoepth, ce qui en fera un moine ayant quelques facultés nouvelles, mais aussi quelques restrictions.

Vous pouvez aussi dessiner votre personnage (la « Hero Machine » peut vous y aider) ou acheter une figurine pour le représenter (ou acheter la figurine d’abord, et faire le personnage après en fonction). Ensuite, vous pouvez coller votre dessin ou une photo de la figurine sur la feuille de personnage à la manière d’une photo d’identité.

Nous avons déjà vu que les attributs et autres caractéristiques permettaient de se faire une première idée d’un personnage. Pensez aussi aux mentions de la fiche de personnages telles que couleur de peau, signes particuliers, religion, origines sociales et géographiques. Il vous reste encore à l’équiper…

L’équipement

Vous voulez jouer un ninja, un samouraï ou un pirate dans Tunnels & Trolls ? Rien de plus facile : commencez par l’habiller et l’équiper en conséquence ! Un rien habille un bon personnage: sombréro sur la tête, pipe serrée entre les dents, ouistiti sur l’épaule, un tatouage sur le bras buriné, et de longues moustaches huilées, avec, en musique de fond, l’homme à l’harmonica. 🙂

(c) Larry Elmore

(c) Larry Elmore

Les listes d’équipement de Tunnels & Trolls, en particulier celles des armes et armures, sont probablement parmi les plus complètes de tous les jeux de rôle. De plus, au cours de ses aventures, votre aventurier mettra sans doute la main sur bien d’autres objets encore. On peut trouver de nouvelles armes et autres objets dans les différents fanzines pour T&T (nous recommandons le fanzine gratuit TrollsZine, c’est ce qui se fait de mieux aujourd’hui, bien qu’en anglais) pour augmenter encore la diversité.

On s’imagine ordinairement les amazones à dos de cheval, armées d’une lance et d’un arc, portant un pantalon et une tunique scythes. Elles portent souvent une épée, mais elles préfèrent jeter des javelines et décocher des flèches sur leurs ennemis que combattre au corps à corps. Les amazones devraient avoir une dextérité élevée (si ce n’est pas le cas, faites-en plutôt une marchande !). Vous pouvez également leur mettre entre les mains le labrys, la fameuse hache bipenne des amazones.

En fait, la souplesse de T&T est telle qu’elle vous permet de créer n’importe quel type de personnage. Il suffit d’utiliser les principaux types (ou archétypes) des règles et de les affiner. Ainsi, les ninjas, les samouraïs, les pirates, les gladiateurs, les barbares, les amazones, les chevaliers, les paladins et les assassins sont tous des types de guerriers.

Si vous voulez bien faire comprendre que votre personnage est un Viking, et non un guerrier standard, vous aurez besoin des talents pour lui apporter la touche finale.

Les talents

Les vikings ont des femmes fortes !

(c) Michael Kutsche – Une Viking originale

Les talents n’ont pas leur pareil pour donner à vos personnages à la fois des facultés nouvelles et des caractéristiques qui les rendront uniques. Ils sont si souples qu’ils peuvent répondre à pratiquement tous vos besoins.

Les talents sont taillés sur mesure. Par conséquent, inutile de se référer à une liste ou à un tableau de dons et autres facultés.

Par exemple, s’il vous faut un assassin, prenez un guerrier et donnez-lui un talent de furtivité ou de concoction de poisons. Les ninjas devraient avoir un talent d’arts martiaux ou d’acrobatie. Les amazones devraient normalement avoir un talent d’équitation (non, ne souriez pas, ce talent peut lui sauver la vie et être le point de départ de combats vraiment hors normes !). Et quand on parle d’équitation, il peut s’agir de n’importe quel type de montures, si vous voulez lui donner un talent large. Qui sait, elle troquera peut-être un jour son cheval des steppes contre un pégase ou une guivre ? Le talent d’équitation peut également inclure la faculté de tirer à l’arc sur un cheval lancé au galop. Les barbares devraient probablement être dotés d’un talent de survie, d’un talent de lutte à mains nues ou d’un talent pour effrayer leurs adversaires, etc. Au fond, il vous suffit d’inventer vos talents en fonction de l’idée que vous vous faites de votre personnage. Si vous avez décidé de créer un « moine ivre », donnez-lui les talents qui vont avec (talent pour tenir l’alcool, par exemple).

La part de mystère

Dr Jeckyll & Mr HydeSans doute avez-vous déjà été surpris par quelqu’un que vous pensiez connaître depuis très longtemps et qui, un jour, s’est révélé sous un jour inattendu. Peut-être n’avez-vous pas encore découvert que votre conjoint est en fait un espion, à l’instar de l’intrigue du film La totale, repris par les Américains (Total Recall). Quoi qu’il en soit, vous avez sans doute une vague idée de ce dont nous parlons…

Vos personnages de T&T doivent eux aussi avoir leur part de mystère si ce n’est leur part d’ombre. C’est leur côté caché, celui qu’ils ne montrent pas (en principe) aux autres, ou qu’ils ne montrent que contraints et forcés. Il peut s’agir d’un secret honteux, d’un passé gênant ou d’une activité inavouable, bien sûr. Mais il peut aussi s’agir au contraire de choses très flatteuses, mais que l’intéressé préfère cacher : il est un poète célèbre, mais écrit sous un nom de plume pour ne pas entacher sa réputation de guerrier sanguinaire, ou il est le chef d’une société secrète, ou un spécialiste reconnu de l’histoire de l’empire de Khazan, mais seulement à ses heures perdues et sous un autre nom…

Imaginez un doux rêveur qui fait profession de barde (citoyen), mais qui assassine les gens la nuit, un filou mal fagoté qui est en fait le bâtard du grand-duc de Kasar, ou encore un barbare féroce que l’on surnomme le prince des philosophes dans le cercle étroit des lettrés.

Cet élément peut avoir des usages multiples:

  1. il peut permettre au MJ d’enrichir ses scénarios en rebondissant sur la part de mystère des personnages (en faisant ressurgir un personnage de leur passé, ou des relations inavouables, ou des attirances peu orthodoxes ; en leur rappelant des origines familiales ou des dettes anciennes qui les plongeront dans une aventure, etc.) ;
  2. il peut permettre aux joueurs de mieux « jouer » leur(s) personnage(s) et
  3. il peut créer des interactions intéressantes entre les personnages d’un groupe, des relations plus complexes qu’il n’y paraît au premier abord.

Il y a certainement encore d’autres manières de mettre à profit la part d’ombre de vos personnages. Si vous avez des idées, les commentaires sont ouverts sous l’article !

Conseil : Vous pouvez appuyer cette part d’ombre sur un ou des talents. Par exemple, si votre personnage a un talent d’alchimie, pourquoi ne pas lui inventer un passé de concocteur de poisons pour la guilde des assassins 🙂

Une dernière chose : Chaque joueur peut choisir de révéler tout ou partie de la part de mystère de son ou de ses personnages au MJ et/ou aux autres joueurs ou à certains d’entre eux 🙂